Petra, Jordanie.
Eh bien, parlons un peu plus des Nabatéens.
Ainsi, c’est ce peuple qui a gravé les magnifiques monuments que l’on peut voir sur le site de Petra.
Songez que le vent chargé de sable balaie la cité de pierre constamment. Et que le grès qui en constitue les parois n’est que du sable agrégé. Autant c’est là un matériau aisé à sculpter, autant il est prompt à s’éroder.
Ce que vous voyez n’est donc que l’ombre des merveilles du passé, tous les détails, toutes les finesses, le sourire des statues, tout s’est évanoui à jamais…
Petra est remarquable par sa géographie, par la présence de sources d’eau au milieu du désert, et par la protection naturelle offerte par sa situation : une vallée encaissée, accessible par le Sîq, une gorge facilement défendable, ou par un éprouvant sentier de montagne. Enfin, les parois de grès rose offrent de nombreux abris dans les cavités rocheuses qui grêlent le site.
Les Nabatéens n’ont pas été les premiers à hanter les lieux : les Édomites, un peuple de langue cananéenne, proche de l’hébreu, les y ont précédés, mais étant médiocres bâtisseurs, ils n’ont pu tirer profit du lieu, et l’abandonnèrent peu avant l’arrivée des Nabatéens.
Ces derniers semblent avoir été à l’origine des nomades de langue arabe, établis d’abord dans la région du Yémen.
Ils parlent arabe mais utilisent l’alphabet araméen, une variante de l’alphabet phénicien (inventé à Byblos, au Liban actuel, souvenez-vous) employé d’abord par les Araméens, un peuple cananéen, cousin des Édomites.
Ils utilisent d’ailleurs la langue araméenne dans leurs écrits. Nous savons qu’ils parlaient arabe à cause de leurs noms propres, qui sont effectivement arabes.
Leur variante de l’alphabet araméen deviendra progressivement l’alphabet arabe, tout comme une autre variante dite araméen carré viendra remplacer l’antique alphabet hébraïque directement issu du phénicien, pour devenir l’alphabet hébreu contemporain.
Au passage, l’alphabet araméen sera à l’origine de la plupart des alphabets du monde, à l’exception des alphabets européens qui dérivent du phénicien (très proche de l’araméen) via le grec, et de l’alphabet chinois et de ses dérivés.
Une fois installés à Petra, les Nabatéens établissent un système de citernes taillées dans le roc ou en terre cuite pour recueillir les eaux de pluie. Ils creusent des tranchées horizontales dans la paroi du Sîq et y placent des conduites en céramique.
Petra est située alors à la croisée des routes commerciales que les caravaniers parcourent pour transporter l’ivoire d’Afrique, les perles de la Mer rouge, les épices d’Inde, la soie de Chine, et surtout l’encens du Yémen, utilisé comme offrande religieuse dans toute le monde antique.
Les Nabatéens gardent secrètes leurs routes commerciales et les citernes cachées qui permettent d’alimenter en eau leurs comptoirs.
Ils accueillent les caravanes à Petra, offrant sécurité, nourriture, eau et logis en échange de fortes taxes. Petra est également un important marché.
L’empire romain mettra fin au règne des Nabatéens à Petra.
L’avènement du christianisme, religion qui se passait de l’encens pour ses rites, ainsi que le changement des routes commerciales réduisirent le rôle de la ville, qui fut de nouveau désertée à la suite d’une série de tremblements de terre (Petra est située au point de contact des plaques africaine et arabique).
Le site fut redécouvert par un explorateur suisse au début du XIXe siècle, et voici que j’en foule le sol poussiéreux de mes bottines en daim…